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H&M : la mode éthique qui se veut plutôt fric


Si la doctrine du pollueur-payeur n’est pas la mieux appliquée actuellement, il est certain que les plus gros pollueurs au monde s’appliquent à détourner nôtre regard des éléments les plus gênants, vers des actions plus payantes. Et oui, investir dans quelque chose de plus durable, de plus responsable et donc de plus écologique et viable n’est pas pour eux une véritable ambition ; sauf si cette dernière est la source de revenus. 

Et la notion de revenus, le géant suédois du Fast-Fashion H&M la connait bien. Plus qu’un fond de commerce c’est une idéologie qui s’affiche ici. Avec ses vêtements bon marché et de faible qualité, la firme encourage toujours plus les achats compulsifs et compte aujourd’hui plus de 3 900 boutiques dans le monde pour un chiffre d’affaire dépassant les 19 milliards d'euros en 2015. De quoi en faire rêver plus d’un ! Pourtant si on gratte un peu, on s’aperçoit très vite que sous le vernis de la succès story se cachent de vilains petits canards… Outre les multiples scandales qui éclaboussent la firme pour son ignorance volontaire en ce qui concerne les violations des droits de l’homme et les menaces sur la sécurité des travailleurs (on n'oublie pas le scandale du Rana Plaza), d’autres négligences envers l’environnement laissent songeur quant au caractère vraiment éthique de la maison. Alors oui, la firme suédoise est bien l’une des premières maisons à s’être tournée vers une mode durable, dès 2004, en s’approvisionnant en coton biologique, ou en lançant au printemps 2011 sa première « Collection Conscious » faite de matières durables et bio ; optant même pour des robes de mariées cette année, mais il faut vite regarder derrière l’effet d’annonce car si l’engagement est louable, le résultat lui l’est beaucoup moins et sujet à de multiples questions. 
Robe de mariée Collection Conscious by H&M 2016
D’où provient ce coton biologique ? Car vu le prix des pièces, il doit certainement être produit dans des pays en développement qui ont généralement un accès à l’eau restreint et quand on connait la consommation en eau (10 000 litres pour chaque kilogramme de coton cultivé) que nécessite cette agriculture on s’alarme ! Puis, dans quelles conditions est-il produit ? Est-ce que, comme en 2010, le coton certifié bio de H&M contient encore des OGM (30% à l’époque)? Et en ce qui concerne les pièces de la ligne Conscious, quelle quantité représentent-elles par rapport à l’ensemble de la production ? Quel est le salaire de ceux qui la conçoivent ? Et où sont elles produites ? Car les retrouver en magasins après plusieurs milliers de kilomètres ça reste bio mais pas très écolo… A la lecture du rapport développement durable du groupe, consultable directement sur leur site internet, on s'aperçoit donc qu'il y a encore beaucoup trop de questions qui persistent aujourd'hui...
Pourcentage de coton biologique utilisé par année / source H&M Sustainability report 2014
Toutes ces parts d'ombre méritent donc méfiance et à l’heure où l’écologie et le développement durable commencent à prendre racine dans nos sociétés, suscitant la convoitise des consommateurs, il est légitime de se demander si les engagements verts signés H&M ne sont pas simplement du Greenwasching transformant l’éthique en fric. Et l’effet d’annonce n’est pas terminé puisque la marque H&M a sorti, en janvier dernier, une gamme de produits de beauté bio se voulant « bénéfique pour les populations, la planète et le porte-feuille ». 

Mais si tout n’est pas parfait, tout n’est pas à jeter pour autant. Oui H&M a des efforts à faire mais avance à pas de géants tout de même. C’est surtout une initiative qui a fait des émules chez ses consoeurs Zara, Forever 21 and Co dont la démarche n'est pas plus glorifiante. Le plus dur pour elles est sûrement de concilier le caractère ultra contradictoire qu’il y a entre l’univers de la fast-fashion et leurs ambitions éthiques. Cela revient un peu à se tirer une balle dans le pied. Maintenant il faut trouver là où cela sera le moins douloureux. Et à ce jeu, nous sommes nous aussi responsables. Leur contradiction est la nôtre. Pourquoi aller chez H&M pour acheter quelque chose de durable? Il y a un problème de philosophie flagrant, mais cela devient énervant quand la maison fanfaronne à se dire le numéro un de la mode bio. Prétendre être engagée, passe encore, mais il ne faut pas non plus pousser mémé dans les orties ; il y a encore du boulot pour qu’elle soit la championne du développement durable.

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